« Depuis 2021, on se prépare pour arriver dans le bassin Vauban à Saint-Malo avec un binôme marin-bateau au top. Le fait de courir en équipage permet de naviguer un cran au-dessus par rapport au solitaire, de bien identifier les limites à ne pas dépasser. Rien ne remplace la confrontation en course sur un parcours offshore pour alimenter notre expérience collective et voir où se situent nos concurrents, » explique ce jeudi Yves Le Blevec. Et le skipper d’Actual Ultim 3 d’ajouter : «Pour autant, quand on prend le départ d’une course – c’est un prérequis – l’objectif reste de gagner. Pour moi et l’équipe, pas question de réduire le premier rendez-vous de cette saison 2022 à un warm-up de la Route du Rhum. Cela reste une course à part entière. En premier sur le dossier de la pile, l’objectif sera d’aller le plus vite possible sur la meilleure trajectoire. »
Le ton est donné. Demain, les enjeux de la compétition l’emporteront dès le coup de canon en baie de Concarneau. Au regard des dernières prévisions météo, il emmènera la flotte vers Lanzarote aux Canaries à laisser à tribord. Puis les équipages se dirigeront vers l’île de Santa Maria aux Açores d’où ils remonteront vers Concarneau. « Légèrement plus court que le premier tracé de 3500 milles, ce parcours s’adapte aux conditions attendues sans toucher à la configuration initiale dessinée pour permettre aux équipages de naviguer pendant une semaine sous toutes les allures, » justifie Gildas Morvan, directeur de course de cette première confrontation sportive en version trimaran Ultim. Du près, du portant, du reaching et encore du près, dans des vents légers et de la bonne brise : les équipages seront bien servis, et toute leur belle garde-robe sera de sortie sur ce parcours aussi complet que complexe.
Petits airs au départ, accélérations au cap Finisterre
Pour Cyrille Duchenne de Météo Consult, le scénario de la course se déroulera dans le cadre d’une « situation classique de début d’été avec l’anticyclone des Açores qui remonte vers le golfe de Gascogne. » De quoi offrir des conditions très favorables pour le départ à la mi-journée avec un vent de Sud-Ouest modéré de 10 nœuds en baie de Concarneau sous un ciel changeant qui se partagera entre soleil et nuages. Le spectacle s’annonce superbe sur le plan d’eau finistérien. Mais pour les équipages l’heure d’un premier choix aura d’ores et déjà sonné, même si tout porte à croire qu’ils vont faire cap à l’Ouest vers la mer d’Iroise pour échapper aux vents plus faibles générés par la bulle anticyclonique s’installant sur le golfe de Gascogne. « Durant la première nuit, ils vont partir chercher le front froid associé à une perturbation sur le proche Atlantique, derrière laquelle ils vont toucher, en fin de nuit début de matinée samedi, du vent portant de Nord-Ouest, » détaille le météorologue. Il s’agira d’entrée de jeu de trouver un meilleur compromis pour aller chercher ces vents favorables, sans trop rallonger la route.
Place ensuite au cap Finisterre, qui sera fidèle à sa réputation dans un vent de Nord 25-30 nœuds, avec des rafales à près de 40. Les choses vont dès lors se corser le temps de cette épisode plus musclé pour les équipages engagés dans une belle course de vitesse sous haute vigilance. Tout l’enjeu consistera à faire parler leur expérience et leur bon sens marin pour bien préserver l’intégrité de leur machine. Au fil de la descente vers les Canaries, le vent de Nord à Nord-Est va ensuite baisser d’intensité jusqu’à Lanzarote, cette île canarienne avant de faire cap sur les Açores. Au reaching, cela promet de filer sous les flotteurs des géants qui pourraient sur ce tronçon faire parler tout leur potentiel de vitesse. Gageons que tous mettront du charbon dans la machine avant leur retour vers la Bretagne dans un vent en pleine face. Beaucoup de manœuvres et un peu d’inconfort ne sont pas exclus avant les premières arrivées estimées, dans une semaine pile au terme de ce run atlantique aussi tactique que tonique.